Hier après-midi, je suis allé faire un tour au Parc Culturel de Valparaíso; un endroit beaucoup moins pompeux que son nom ne le laisse craindre. On y trouve toujours quelques gamins en train de taper dans un ballon. Ce week-end s'y tient le Salon du Livre indépendant. J'ai d'abord assisté à une causerie autour d'un bouquin mettant en avant les bienfaits de certains principes anarchistes sur l'éducation et la déconstruction de schémas. On était une dizaine de curieux.
Après la présentation, je suis allé traîner d'un stand à l'autre, glissant dans mon sac "Mis dos mundos", un livre de Sergio Chejfec, un écrivain argentin dont je n'avais jamais entendu parler. Je l'ai acheté parce qu'il y avait un prologue d'Enrique Vila-Matas, que je suis allé lire dans le parc, profitant des derniers soupirs du soleil.
La photographe du Salon, déguisée en punkette, est venue me conseiller de ne pas laisser traîner mes affaires, m'indiquant du bout du menton d'autres épouvantails à la dégaine ma foi pas si éloignée de la sienne. J'ai obtempéré des sourcils.
Dans la préface, il y avait ces mots, qui semblaient faire écho à mon déblogage du jour précédent:
"Parce qu'on ne découvre pas de terre nouvelle sans accepter de perdre de vue, premièrement et pour longtemps, toute côte."
Un peu plus loin, Vila-Matas parle de la nouvelle de Chejfec comme de "la promenade la plus complète qui lui a été donné de faire dans la géographie solitaire de nos fissures, dans la profonde géographie de ces trous qui ont tendance à être précisément des portes donnant sur l'inconnu [...]."
Mes jambes ont eu alors très fortement envie de se mettre en mouvement, et avec elle les ressorts de l'écriture qui s'actionnent toujours à ces moments-ci, dans les méandre de ma caboche. C'est que je suis l'auteur, dans ma tête, quand je me balade au crépuscule, de quelques unes des plus belles pages de la littérature flânée et flânante. Elles n'ont pas d'équivalent. D'ailleurs c'est bien simple, elles n'ont existé que dans une sorte de fumée enivrante qui s'empare de tout mon corps quand je me laisse porter par la lumière particulière qui règne parfois en fin de journée.
Chacune des phrases composant ces proses poétiques sont en soi de délicieux petits biscuits, parfaits pour tremper dans du café. On les dépose ensuite sur sa langue. On est bien. Pas forcément heureux, mais comme réconcilié avec ses doutes et avec l'ensemble du tableau boiteux de son existence.
Cette marotte littéraire mentale doit avoir un lien avec tous ces buts que j'ai marqués en finale de Coupe du Monde, avec toutes ces passes millimétrées qui ont permis à mon équipe de gagner le Championnat d'Europe, dans ma tête aussi, enfant. Et même encore déjà plus si enfant que ça.
Je pense souvent à cet ami, enseignant universitaire reconnu, qui a plus de 50 ans et m'a avoué, un jour où on parlait de tout autre chose, qu'un de ses gros problèmes était que, dans ses pensées, il était encore potentiellement le meilleur joueur de foot de l'Histoire.
Il y a un moment qu'il ne me donne plus de nouvelles. Peut-être qu'il a finalement réussi à se glisser dans une faille spatio-temporelle.
En sortant du parc, j'ai vu qu'il n'y avait que deux personnes en train d'écouter la performance poético-musicale prévue au programme. Je me suis dit que certaines marges avaient encore vraiment de la marge.
J'ai aussi aperçu cette phrase, notée contre un mur:
"Déambuler pour mieux flotter."
Après la présentation, je suis allé traîner d'un stand à l'autre, glissant dans mon sac "Mis dos mundos", un livre de Sergio Chejfec, un écrivain argentin dont je n'avais jamais entendu parler. Je l'ai acheté parce qu'il y avait un prologue d'Enrique Vila-Matas, que je suis allé lire dans le parc, profitant des derniers soupirs du soleil.
La photographe du Salon, déguisée en punkette, est venue me conseiller de ne pas laisser traîner mes affaires, m'indiquant du bout du menton d'autres épouvantails à la dégaine ma foi pas si éloignée de la sienne. J'ai obtempéré des sourcils.
Dans la préface, il y avait ces mots, qui semblaient faire écho à mon déblogage du jour précédent:
"Parce qu'on ne découvre pas de terre nouvelle sans accepter de perdre de vue, premièrement et pour longtemps, toute côte."
Un peu plus loin, Vila-Matas parle de la nouvelle de Chejfec comme de "la promenade la plus complète qui lui a été donné de faire dans la géographie solitaire de nos fissures, dans la profonde géographie de ces trous qui ont tendance à être précisément des portes donnant sur l'inconnu [...]."
Mes jambes ont eu alors très fortement envie de se mettre en mouvement, et avec elle les ressorts de l'écriture qui s'actionnent toujours à ces moments-ci, dans les méandre de ma caboche. C'est que je suis l'auteur, dans ma tête, quand je me balade au crépuscule, de quelques unes des plus belles pages de la littérature flânée et flânante. Elles n'ont pas d'équivalent. D'ailleurs c'est bien simple, elles n'ont existé que dans une sorte de fumée enivrante qui s'empare de tout mon corps quand je me laisse porter par la lumière particulière qui règne parfois en fin de journée.
Chacune des phrases composant ces proses poétiques sont en soi de délicieux petits biscuits, parfaits pour tremper dans du café. On les dépose ensuite sur sa langue. On est bien. Pas forcément heureux, mais comme réconcilié avec ses doutes et avec l'ensemble du tableau boiteux de son existence.
Cette marotte littéraire mentale doit avoir un lien avec tous ces buts que j'ai marqués en finale de Coupe du Monde, avec toutes ces passes millimétrées qui ont permis à mon équipe de gagner le Championnat d'Europe, dans ma tête aussi, enfant. Et même encore déjà plus si enfant que ça.
Je pense souvent à cet ami, enseignant universitaire reconnu, qui a plus de 50 ans et m'a avoué, un jour où on parlait de tout autre chose, qu'un de ses gros problèmes était que, dans ses pensées, il était encore potentiellement le meilleur joueur de foot de l'Histoire.
Il y a un moment qu'il ne me donne plus de nouvelles. Peut-être qu'il a finalement réussi à se glisser dans une faille spatio-temporelle.
En sortant du parc, j'ai vu qu'il n'y avait que deux personnes en train d'écouter la performance poético-musicale prévue au programme. Je me suis dit que certaines marges avaient encore vraiment de la marge.
J'ai aussi aperçu cette phrase, notée contre un mur:
"Déambuler pour mieux flotter."
Ah voilà le raphu qui est de retour ahahah!!!El mundo del fin del mundo... tu n'es plus très loin de ces paysages incroyables de Patagonien. Allez vous aller sur l'île chiloe? Le titre en espagnol est de Luis sepulveda bien sûr! Si tu trouves des auteurs qui y ressemblent dans l'écriture fais moi signe!!!
RépondreSupprimer